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Suite de ma chronique de Crack
Jordis est un indécrottable idéaliste : il manque gâcher lui-même son propre ouvrage en partant du principe (bourgeois et assumé) que la vérité réside dans les marges, que les crackers sont, peu ou prou, des victimes de l'hydre capitaliste et que d'une façon ou d'une autre, ils sont dépositaires d'une vérité sociale, voire métaphysique, que nous, (pauvres) insiders, avons perdu de vue. Ce parti pris optimiste alourdit sa langue, truffée de saillies humanistes et de poses poétiques assez désagréables, et donne à son approche un caractère angélique qu'on a un peu de mal à digérer. Littérature, non ! Sociologie, oui !
Paris sous la ceinture
Paris sous la couture, Paris sous les cartons et sous la couverture des drogues est peint admirablement. Le réalisateur s'intéresse, sans y toucher, au rapport au temps des crackers, qui est sûrement la clé du tout. Comment devient-on cracker ? Pourquoi devient-on un mort-vivant ? Un mort-vivant est-il toujours vivant ou parfois mort et d'autres fois vivant ? Celui qui répondra à ces questions n'est pas encore né et Jordis y revient jusqu'au bout de son voyage.
Certains personnages sont sublimes et se tiennent à eux seuls. Ils disparaissent à la fin comme des mages. Chacun sa came, chacun sa faute, et tant pis pour l'Alabama. Crack est un bon livre, un Paris Plage socio-clandestin qui sort au moment où même Christine Angot prend le scooter à croucrou pour la porte de la Chapelle. Il faut travailler au tourisme post-industriel, post-culturel, au tourisme post-humain et post-mortem. Il faut bâtir des bateaux-mouche pour poursuivre les lumières de la nuit. Jordis a une barque qui tient l'eau et fait le passeur pour 19 euros.
Tristan Jordis, Crack, Seuil, août 2008.
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Le roman "Les Belles Endormies" de l'écrivain japonais Kawabata Yasunari est une œuvre poignante et délicate qui explore les thèmes de la vie, de la mort et de la beauté. L'histoire suit un vieil homme nommé Eguchi qui décide de passer ses nuits dans une maison spéciale où de jeunes femmes endormies sont mises à sa disposition. Ces femmes, appelées "Les Belles Endormies", ne sont pas conscientes de la présence d'Eguchi et il n'a aucun contact physique avec elles. Au lieu de cela, il passe simplement ses nuits à les observer et à réfléchir à la nature de la beauté et de la jeunesse.
Le roman est rempli de moments de contemplation et de méditation sur la vie et la mort. Eguchi est hanté par ses propres souvenirs et regrets, et les femmes endormies représentent pour lui la jeunesse éphémère et la beauté fugace. Kawabata Yasunari explore la façon dont la vie et la mort se côtoient étroitement et comment la beauté peut être trouvée même dans les moments les plus sombres.Eguchi est l’un des « clients de tout repos » des belles endormies. Au contact de leur nudité, fières de jeunesse, il est assailli par des souvenirs érotiques et des visions poétiques. Lové contre ces « sortes de Bouddhas », il se livre à son auto-analyse. Quelques mois après la parution des Belles endormies, en 1970, son disciple et ami Mishima se suicide par seppuku. Kawabata, à l’aube de sa vie, est très affecté par cette perte, deux ans après que le prix Nobel de littérature l’ait sacré et ait assis sa notoriété mondiale… Aujourd’hui, Kawabata Yasunari est unanimement considéré comme un écrivain majeur du XXe siècle. Homme complexe et secret, moderniste ancré dans ses traditions culturelles et fin connaisseur de la littérature occidentale, il laisse une œuvre d'une beauté intemporelle qui relie l'Orient à l'Occident dans un style d'écriture très personnel.
"Les Belles Endormies" est un voyage émotionnel profondément touchant qui pousse les lecteurs à réfléchir sur leur propre relation à la beauté, à la vie et à la mort. C'est un roman qui laisse une marque indélébile sur ceux qui le lisent, les invitant à méditer sur les mystères de l'existence humaine.
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"Belle du Seigneur" est un roman écrit par l'écrivain suisse Albert Cohen. L'histoire se déroule à Genève, dans les années 1930, et explore les thèmes universels de l'amour, de la passion et de la souffrance.
Le personnage principal, Solal, est un homme d'origine juive qui occupe un poste élevé à la Société des Nations. Il tombe amoureux d'Ariane, une femme mariée et aristocrate, créant ainsi une histoire d'amour intense et passionnée qui les consume tous les deux.
Cependant, leur relation est compliquée par les conventions sociales de l'époque et le poids des attentes familiales. Solal se retrouve pris entre son amour pour Ariane et ses responsabilités envers sa communauté.
Le roman explore les thèmes de l'identité, de la loyauté et de la recherche du bonheur. Albert Cohen nous plonge dans l'intimité des pensées et des émotions de ses personnages, nous permettant de comprendre leurs motivations et leurs tourments.En 1968, Belle du seigneur reçoit le Grand Prix de l'Académie française. Après 30 ans d’écriture, c’est la consécration pour Albert Cohen. Dans les rues du Quartier latin où les femmes réclament à grands cris la libération sexuelle, le roman est taxé de phallocratie. Œuvre majeure de l’auteur, ce livre est pourtant considéré par certains critiques comme l’un des romans centraux de la littérature française. C’est à ce titre, d’ailleurs, que la Pléiade le publie en 1986. Le 23 décembre 1977, une interview exclusive menée par Bernard Pivot, diffusée lors de l’émission télévisée « Apostrophes », propulse Albert Cohen sur devant de la scène littéraire.
"Belle du Seigneur" est un chef-d'œuvre de la littérature française, souvent comparé à "Roméo et Juliette" pour son intensité et sa tragédie. C'est un roman incontournable pour tous les amoureux de la littérature classique.
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Dans son livre, "Chroniques de la Chine communiste," l'auteur Yves MA emmène les lecteurs dans un voyage à travers l'histoire tumultueuse de la Chine sous le régime communiste. Avec une narration riche et une analyse perspicace, MA offre un compte rendu détaillé des développements politiques, sociaux et économiques qui ont façonné le pays au cours du siècle dernier. Un livre à ranger parmi les essentiels à connaitre sur la Chine moderne et du XXeme siècle comme : La Chine contemporaine d'Alain Roux ou La Chine et ses démons – Aux sources du sino-totalitarisme, d'Emmanuel Dubois de Prisque
Du règne de Mao Zedong et de la fondation de la République populaire de Chine à la Révolution culturelle et aux réformes de Deng Xiaoping, MA capture les hauts et les bas de l'expérimentation communiste chinoise. S'appuyant sur une richesse de sources primaires et de témoignages de première main, il propose un portrait nuancé et captivant d'une nation en transition.L’auteur aborde les grands défis qui attendent la Chine, ses mouvements de colère, ses commémorations, le portrait de ses grands hommes qui ont conduit aux réformes et à la modernité, également la peur d’oublier le chemin, enfin l'étranger souhaitant sa chute, la cohésion nationale chinoise est mise à l'épreuve.
Ces chroniques mensuelles peuplées d’anecdotes savoureuses vous proposent de plonger dans l’envers du décor du Parti communiste chinois, de connaître ce qu’il s’y passe, sans miroir déformant. Les analyses y sont pertinentes, elles nous offrent un regard unique sur le communisme en Chine, lequel diffère très sensiblement de nos habituelles visions occidentales de la question.
Ce qui distingue "Chroniques de la Chine communiste" est la capacité de MA à humaniser les individus pris dans les grands courants de l'histoire. À travers des esquisses de personnages vives et des anecdotes personnelles, il donne vie aux vraies personnes derrière les slogans politiques et la propagande. Cela rend l'expérience de lecture plus captivante et intime, permettant aux lecteurs de se connecter aux luttes et aux triomphes de ceux qui ont façonné le destin de la Chine.
Dans l'ensemble, "Chroniques de la Chine communiste" est un incontournable pour quiconque s'intéresse à l'histoire de la Chine moderne et à l'héritage du communisme dans le pays. La recherche minutieuse de MA et sa narration évocatrice font de ce livre une précieuse contribution à la littérature croissante sur ce sujet.Chroniques de la Chine communiste Yves Ma, 2012,
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Tristan Jordis se présente au début de son roman (qu'on appellera ainsi pour faire simple) comme un jeune réalisateur à la recherche d'un sujet pas trop cher, humain et suffisamment spectaculaire pour intéresser quelques personnes. Il arrête son choix sur l'évocation du monde du crack dans l'Est de Paris. Que sont devenus les crackers historiques de Stalingrad ? Comment filmer des ombres ? Comment soumettre au traitement mensonger de la lumière cinématographique des gens que la société (sic) et accessoirement eux-mêmes ont décidé de plonger et de maintenir dans la semi-clandestinité jusqu'à liquidation des stocks ? C'est ainsi que le film deviendra finalement un livre.
Crack de Tristan Jordis : Chevalier blanc et littérature noire
Jordis, il ne s'en cache pas, tente de lutter contre sa propension à voir le bien partout. Il ne peut s'empêcher de réhabiliter la mémoire des gens d'en dessous et en pince pour ses sujets. Heureusement pour nous, la réalité est plus forte que lui et l'amène assez vite à balancer son propos. Certains en veulent à son argent. D'autres lui posent des lapins. La violence surgit à bon escient pour rappeler qu'on n'est jamais ici en territoire marxiste mais bien dans un univers hobbesien primitif où les alliances ne sont tenues que par la puissance supposée des uns et des autres. L'écrivain s'introduit peu à peu dans la nuit du crack, de la prostitution consommatrice et des sales coups. Il rencontre des figures ambiguës, souvent séduisantes et fascinantes, mais presque toujours brisées ou prêtes à défaillir.
L'odyssée du caillou devient passionnante au fur et à mesure que Jordis descend les étages. On passe de squat en squat. On file les fugitifs qui glissent comme des anguilles d'un point à un autre pour traquer la galette. Jordis décrypte l'économie des dealers, des putes et des macs. Il s'attarde sur les histoires d'amour et les instants de lumière, là où la nuit est la plus noire. Ses nuits deviennent plus belles que ses jours. Jordis ne cède pas à la tentation et ne se drogue pas. Il ne se fait pas dépouiller et quitte peu à peu son masque de touriste et de passager clandestin pour un déguisement de compagnon de route qui en dit long sur ses propres tourments.
Si l'interrogation de la société réelle par le biais de la société des crackers ne fonctionne pas tout à fait dans le livre, Crack vaut surtout pour la qualité de l'enquête et l'abnégation de l'auteur. On se fout pas mal de ses réflexions : des faits, rien que des faits. Sa descente aux enfers est ce qui fait tout l'intérêt de ce livre : Jordis se trouve un, puis plusieurs guides et réussit à nous faire un tour du propriétaire aussi complet.
à suivre
Tristan Jordis, Crack, Seuil, août 2008.
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